La diaspora scientifique africaine en Europe est un vivier pour les universités et les centres de recherche du continent. Mais jusqu'à présent, personne ne s'était préoccupé de la dénombrer.
Depuis 2010, plus d’un million d’Africains se sont installés en Europe selon les derniers chiffres du Pew Research Center. Pour des raisons diverses : l’exil politique, la fuite de la famine, l’espoir d’un avenir meilleur… ou, moins dramatiquement, la possibilité de poursuivre des études à l’université, et d’obtenir un doctorat. Combien sont-ils, justement, ces doctorants africains en Europe ? Difficile de le savoir.
Eurostat, office de statistique de l’Union Européenne, s’en est apparemment préoccupé : son site internet propose un tableau sur ce sujet. Toutefois, il n’a pas encore été rempli par les experts de l’Union. Seules les lignes de l’Islande et de l’Irlande sont à jour, et sans distinction entre les niveaux d’étude, de la licence au doctorat.
France, Allemagne et Royaume-Uni
Il faut donc se tourner vers chaque pays pour tenter de trouver des réponses. Ainsi, la France, premier pays d’accueil des étudiants africains en Europe, compte ceux-ci. Campus France, agence gouvernementale chargée de la promotion de l’enseignement supérieur à l’étranger a publié en 2017 une étude qui dénombrait les Africains faisant leurs études en France, du lycée au doctorat.
Résultat : 7 667 africains faisaient alors un doctorat en France. Soit 7% environ de tous les Africains inscrits à l’université dans le pays.
En Allemagne, la situation est proche. En effet, selon l’Office allemand d’échanges universitaires, 7,8 % des étudiants africains inscrits dans les universités du pays sont en doctorat, soit 2 160.
Au Royaume-Uni, la proportion est bien plus élevée : l’Agence Statistique des Hautes Études recense 4 110 doctorant africains, soit 13 % des étudiants originaires du continent.
Et ailleurs?
Ces trois pays à la comptabilité précise sont malheureusement des exceptions : les organisations chargées de la coopération universitaire en Suisse ou en Autriche, par exemple, n’ont aucune idée du nombre de doctorants africains dans les laboratoires de ces pays.
Et dans beaucoup d’autres pays européens il n’y a pas d’organisation centralisée. En Suède et ailleurs, les universités elles-mêmes se chargent d’accueillir et d’aider les étudiants étrangers. Il est donc plus difficile de réunir les données.
La différence entre la France et l’Angleterre montre à quel point la situation peut varier d’un pays à l’autre.
Une estimation, quand même
On peut toutefois tenter une estimation grâce aux chiffres, fournis par les États, rassemblés par l’Institut Statistique de l’Unesco. En faisant quelques additions, on calcule que 238 270 africains suivaient des études universitaires en Europe en 2015. La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne en accueillent 174 000 à eux trois. Ce qui en laisse à peu près 64 300 dans le reste de l’Europe.
Si l’on considère que, comme en France, environ 7% de ces étudiants sont en doctorat, il y aurait environ 18 700 doctorants africains en Europe . C’est 2,5 % des 725 000 doctorants de l’Union Européenne. En utilisant le pourcentage du Royaume-Uni, on passe à 22 000. L’incertitude est tout de même de 16 %.
Pourrait-on prendre le problème en comptant les départs des pays d’origine ? Quelques états africains tel le Sénégal, avec le Service de Gestions des Étudiants Sénégalais à l’Étranger, en ont manifesté l’intention.
Anthony Audureau